Mon cher lecteur,
Nous voici en 2018. Il est l’heure de te souhaiter une belle et heureuse année. Comment se passe ta rentrée ? Pour ma part, me voici déjà plongée dans la rédaction du deuxième livre. Je profite d’une pause pour rédiger cette lettre et partager avec toi quelques réflexions qui te seront peut-être utiles…
En décalage… ?
Je ne sais pas quel a été ton parcours. Le mien a été conditionné par les autres. J’ai eu ce « symptôme de la bonne élève ». Bonne élève, j’ai suivi tout ce qu’on me conseillait de faire. Choisir ‘anglais renforcé’ et latin pour être dans les bonnes classes au collège, très bien. Apprendre l’allemand et poursuivre en Bac S, option maths, c’était mieux. D’accord. Dans mon lycée « scientifique », il y avait 8 classes de S pour une demi-classe de L et ES. Autant te dire, en réalité, il n’y avait guère de choix. J’ai suivi la voie qui semblait la meilleure selon mes aînés. Moi ? J’affectionnais l’économie et les langues, la découverte et l’échange. Je ne l’ai pas dit assez fort. C’était évident. Quand on était bonne élève, dans mon lycée, on faisait S.
Si j’avais été une rebelle j’aurais peut-être dit plus fort que « non cela ne me plaisait pas », je ne trouvais aucun intérêt à ce que je faisais. Evidemment, tout dépend des professeurs que l’on a, les miens me demandaient des équations sans les contextualiser. Techniquement parlant, cela ne me posait pas de problème. Je répondais mécaniquement. J’essayais de satisfaire professeurs et parents. Rentrer dans le moule quand bien même je ne le comprenne pas. Je me rappelle chercher à répondre ce que l’on attendait comme réponse et non ce qu’il me semblait intéressant de répondre. Une sorte de sur-adaptation.
C’est en retrouvant cet été une copie de français que j’ai compris que ma zone de liberté était le français. Il faut dire que tout le monde s’en fichait de ma note en français, ce n’était pas important comparé aux maths ! Alors je m’amusais et faisais fi des règles. D’un sujet basique sur la coupe du monde 98, j’avais rédigé 3 copies doubles d’un franc délire. « La contagion fut généralisée ! Seuls quelques rares individus, d’une nature sans doute plus résistante purent observer chez leurs compatriotes un état caractéristique de dégénérescence chronique, qui s’accompagne d’une disparition quasi-totale de ce que l’on nomme la raison, et d’une passion à émettre des onomatopées incompréhensibles. « (suite du texte en bas du post). Dans l’anti-thèse, je parlais du côté fédérateur inter-générationnel et de la mixité sociale du foot. Rien à voir avec l’énoncé. Je devais simplement avoir envie d’exprimer mon analyse de la société du haut de mes 15 ans.
Ma prof avait visiblement aimé cette prose et l’avait gratifiée d’un 18 mais certaines autres copies obtenaient un 2 : « excellent mais hors sujet ». Ouille. Quand on regarde seulement la moyenne, je devais finir à 12 et pour tout le monde (sauf pour la prof), le français et l’écriture ce n’était pas mon truc. J’en étais convaincue. D’ailleurs, moi j’étais une scientifique, la preuve : je faisais S, mention maths.
Aujourd’hui, écrire est probablement une des choses que j’aime le plus… Je l’ai découvert il y a… un an.
Se structurer autrement
En réalité, je n’ai que peu de souvenirs de ma vie à l’intérieur du lycée si ce n’est ceux des longues parties de tarots avec les potes. Les maths ne m’intéressaient pas, mais je ne m’ennuyais pas profondément. La raison ? J’étais FAN d’un groupe de musique. C’est probablement le projet le plus structurant de ma jeunesse. Le premier que je raconte quand on me demande mon parcours, bien avant de parler de ma formation.
Cela te fait sourire de m’imaginer groupie d’un groupe de chanteurs pop germanique ? Je comprends 😉 J’ai mis du temps à assumer : c’est la première fois que j’en parle ouvertement. Il faut dire qu’il s’agissait, selon mon entourage, d’un passe-temps incompréhensible et chronophage. Mais mon « truc à moi ».
De l’extérieur, on pouvait voir la naïveté d’une ado écoutant la musique de chanteurs un brin niaiseux, hippies, et pas franchement dans le moule. La réalité ? Je structurais mon premier projet. A une époque où on utilisait AOL et Caramail, où Internet faisait un « tsch tshc psssssh » pour se connecter, je bloquais la ligne téléphonique de mes parents pour coder en PHP mon premier site web grâce à des logiciels hackés sur le site de « supergégé ». Je serais bien incapable de le refaire aujourd’hui (et il n’y avait pas de tutos youtube à l’époque!). Je me demande encore comment j’ai fait… L’innocence face à la complexité du code ou la force de l’optimisme ?
Une chose est sûre : à aucun moment je ne m’étais mis de limite. Personne ne m’avait dit que j’en étais incapable alors j’en étais capable.
La raison aurait tout contredit.
Au final, ce site comptait quelques 200 000 visites et fédérait plus de 10 000 personnes sur son forum ! Comme ce projet a été riche : riche en rencontres, riche en connaissances, riche en apprentissages… Il m’a permis de voyager et de rencontrer des centaines d’inconnus. Pour communiquer avec eux, j’ai appris 4 langues. J’ai découvert la mixité. Appris l’humilité. Tu sais, quand tu arrives à 17 ans au fin fond de la Pologne pour un concert et que ce sont des allemands, 20 ans de plus au compteur, look chevelus grunge qui te dépannent, tu comprends immédiatement le besoin de faire sauter les préjugés.
Et ce « monde des fans » a été une extraordinaire expérience qui me sert encore aujourd’hui quand j’analyse celui de l’entreprise et de la société plus globalement. Il y a une vie parallèle qui se créait avec ses propres codes : les leaders, les chercheurs, les suiveurs,… Et une économie parallèle où les échanges ne se font pas en bitcoins mais en photos, dont la rareté fait la valeur.
Te l’ais-je déjà dit ? J’ai rencontré « mes chanteurs » par hasard dans un coin perdu dans le Var. Ils remplissaient des stades plus grands que ceux de Johnny à la même époque en Allemagne mais passaient leurs vacances en France. Si l’anecdote t’intéresse, je te la raconterai, on pourrait en faire un film tellement l’histoire ressemble à un roman. Ceci dit cette somme d’improbabilités fait qu’aujourd’hui, je ne peux plus croire au hasard. Ces stars qui sont devenues mes amis ont planté en moi la graine du « tout est possible ». Evidemment du jour où je les ai rencontrés, ma passion s’est envolée, c’était la quête qui me stimulait.
Si j’y réfléchis, tous mes projets professionnels ou associatifs ont pris cette même tournure et ont eu ce même objectif : fédérer pour une cause « nouvelle » et en parler.
J’ai mis cette histoire de côté pendant 15 ans. Rien d’intellectuellement stimulant, c’était d’ailleurs pour moi un brin honteux que d’avoir mis tant d’énergie dans un projet désuet. Une « anecdote » d’ado refoulée. Jusqu’à ce qu’on m’interroge sur mon parcours, sur mon enfance ou sur ce côté « multi-potentiels ». J’évoque quasi-systématiquement le fait que l’enfance et le système ne mettent par forcément en avant nos « zones de talents », voire les contredisent.
Moi j’étais une scientifique, d’ailleurs après un bac S, c’était décidé, j’étudierai la physique-chimie.
La valorisation de l’école
Aujourd’hui, j’ai eu envie partager avec toi ces deux anecdotes personnelles. Je reçois tellement de messages sur ces « intelligences » non valorisées par des notes.
Oh, je le sais… J’ai eu de la chance que d’être fan. J’ai pu m’extraire d’une réalité A pour aller dans une réalité B et développer ce que j’aimais faire. J’ai développé mes « vrais talents » dans cet autre univers. C’est seulement il y a un an que j’ai compris… D’ailleurs, tu les connais, toi, tes « vraies » compétences ? Tu as su les voir ces petites choses qui t’émulent et pour lesquelles tu es doué ?
C’est probablement parce que, ado, j’ai voulu parler de ma passion (et de ces chevelus) que j’ai osé parler des sujets qui me tenaient à cœur en faisant fi des incompréhensions, notamment avec l’Optimisme et avec cette vision nouvelle du monde de l’entreprise.
Nul ne devrait se contraindre à suivre un chemin qu’on a pré-établi à sa place… Tu sais, nous vivons une époque formidable. Nous savons que nous ne savons pas ! Nous ne connaissons pas les métiers de demain, ni la société de demain. Et si c’était de tes vraies compétences qu’on avait besoin ?
Bien-sûr, il y a une raison à tout. Je te l’ai dit plus haut, je ne crois pas au hasard. D’ailleurs, qui sait… Un jour, ma passion pour la physique quantique bouclera peut-être avec le futur de la société…
Je te dis à très bientôt et te souhaite une vraie belle année 2018 !
(Tu trouveras la suite du texte de mes 15 ans en bas de cette lettre),
Catherine
Le texte de mes 15 ans… N’était-ce pas déjà le sujet qui m’anime aujourd’hui ?
« Les français étant facile à manipuler, le symptôme « coupe du monde » a progressivement gagné l’ensemble de la population. Peu à peu, le mal s’est étendu, est même venu s’abattre au fond de nos campagnes ! Les esprits n’étaient plus clairs, les troubles allaient grandissants… La contagion fut généralisée ! Seuls quelques rares individus, d’une nature sans doute plus résistante purent observer chez leurs compatriotes un état caractéristique de dégénérescences chronique, qui s’accompagne d’une disparition quasi-totale de ce que l’on nomme la raison, et d’une passion à émettre des onomatopées incompréhensibles.
Tous avaient, semble-til perdu leurs factultés de raisonnement; leurs habituels centres d’intêrets étaient relégués à un rang subsidiaire, les français avaient le regard fixé sur un ballon. La footballmania avait frappé : « de nombreuses victimes, peu de rescapés ».
« La France n’était ni folle, ni souffrante. Bien au contraire. Comme lors de la libération elle était heureuse ».
On dit souvent « La France est malade ». La coupe du monde fut un remède et permis d’oublier les maux et les dissensions ». Les yeux rivés sur la victoire, plus rien n’avait d’importance.
Petit, Zidane, Barthès… Il faut vivre avec son temps ! les idoles changent, l’enthousiasme reste. »